2. L’embellie (1947 – 1972)
Le nouveau pari d'Eric Rivierre, une usine moderne aux portes d'Orléans
En 1947, la société n’est pas autorisée à reconstruire sur son site de la rue de Coulmiers. L’Etat a pour projet de faire une nouvelle zone industrielle au nord de la ville sur la commune de Fleury les Aubrais. Ces terrains situés à proximité de la RN20 et du nœud ferroviaire de la gare des Aubrais complètement détruits pendant la guerre, offrent les conditions idéales pour une nouvelle zone. La société se voit attribuer un terrain puis un embranchement SNCF, la construction de la nouvelle usine débute en 1950 par Bouygues.
La production de presses à poste fixe ayant repris, celles-ci sont désormais équipées de pneumatiques. Facilitant le transport en particulier pour les entrepreneurs se déplaçant de fermes en fermes.
La presse ramasseuse, un tournant chez Rivierre-Casalis
Le tracteur s’impose de plus en plus dans les fermes, aidé largement par le plan Marshall. Cela signera l’arrivée d’une nouvelle machine chez Rivierre : la presse ramasseuse. Cette machine rencontre un succès immédiat. Lancée en série à partir de 1952, elle est déclinée en 4 versions répondant ainsi à toutes les exigences, entraînée par prise de force ou moteur thermique et tractée par un tracteur ou un animal. Munie d’un châssis monté sur trois roues, le timon est accroché à la troisième roue pour le transport. Un ramasseur à chaines puis à dents alimente le système de pressage similaire aux presses à poste fixe. Elle répond aux attentes des agriculteurs français. La machine peut également être utilisée derrière une batteuse à poste fixe.
La nouvelle usine de Fleury les Aubrais est inaugurée en 1954. L’usine de la rue de Coulmiers sera détruite par la suite. Le terrain est aujourd’hui occupé par le collège Dunois.
A partir du milieu des années 1950 les moissonneuses batteuses remplacent les batteuses fixes, gain de temps, de passages et de main d’œuvre. Rivierre-Casalis met au point deux presses adaptables sur les moissonneuses batteuses. On retrouve ce montage notamment chez Braud, Société Française Vierzon, Dhotel ou Clayson. Certaines seront montées avec des roues folles, soulageant l’arrière de la moissonneuse.
Une société devenue premier constructeur français de presses
En 1955 sort la 15 000ème machine, célébrée par une fête à l’usine. Les presses ramasseuses détrônent ainsi les presses à poste fixe dont la production sera stoppée 5 ans plus tard.
A la toute fin des années 50, la Régie Renault s’intéresse à de plus en plus la motoculture. Elle signe des accords commerciaux avec d’autres constructeurs Français tel que Huard, Kuhn ou Braud. Désirant toutefois son indépendance commerciale, Rivierre-Casalis vend ses machine sous la marque Aurélis, destinée uniquement au réseau Renault Motoculture.
A la suite du décès de son épouse en 1959, Eric Rivierre se retire progressivement des affaires. Il confie la direction à MM. François Leugueu et Jean Brodeaux, hommes de confiance. Le premier ancien journaliste du monde agricole, appelé quelques années auparavant par Eric Rivierre à le rejoindre, le deuxième étant dans la société depuis 1945.
Une gamme complète qui rencontre un grand succès
Rivierre-Casalis aborde les années 60 avec une nouvelle gamme de presses ramasseuses. Conservant le même système de pressage mais abandonnant le système porteur à trois roues. Celles-ci se différencient par leurs châssis. La presse NR à 3 roues sera cependant fabriquée jusque vers 1965. La GR puis GRA dédiée aux plus petites exploitations suivra quelques temps après.
1962, la 50 000ème machine sort des usines de Fleury les Aubrais. C’est cette même année que s’éteint Eric Rivierre après un demi-siècle à la tête de la société. Celle-ci en souffrira profondément. Une plaque à sa mémoire est inaugurée dans l’escalier principal du hall de l’usine de Fleury.
A la conquête d'un nouveau marché : la récolte du maïs
Mais la vie à Orléans continue, et la société s’apprête à aborder un nouveau marché. Depuis la fin de la guerre, la culture du maïs s’implante de plus en plus au nord de la Loire. Rivierre-Casalis désormais bien implantée saisit l’opportunité et développe des machines de récoltes spéciales. Sortent ainsi les CME (cueilleur maïs épanouilleurs) et CMP (cueilleurs maïs portés) pour la récolte d’épis, les CMB (cueilleurs maïs batteur) pour récolte du maïs grain. Ainsi qu’une batteuse pour le maïs en cribs. Ces appareils sont testés pendant plusieurs campagnes et grandement présentées à l’automne 1963 en Beauce, attirant plus d’un millier de visiteurs et curieux. S’ajoute à ça une gamme de cueilleurs adaptables sur moissonneuses batteuses.
C’est à cette époque qu’est choisi le logo emblématique de la marque, un écrou symbole de la mécanique, allié avec un trèfle pour les fourrages et un épi de maïs.
Le site de Fleury sera agrandi passant de 35 000 m² à 75 000 m². Un second site sera construit en 1965 au nord de l’usine principale, le long de la RN20 et possédant une voie de jonction avec la gare des Aubrais. Ce nouveau site sera nommé Riv’ Nord à la différence de l’usine principale qui devient Riv’ Centre. Ce nouveau site sera dédié à l’expédition des machines terminées.
La société profite pleinement de ce contexte des Trente Glorieuses et compte jusqu’à près de 1200 employés. Le raccordement SNCF est également bénéfique, facilitant l’arrivée des matières premières. . Les machines terminées sortent de l’usine par wagon et sont expédiées dans les quatre coins de France ainsi qu’à l’étranger. Des filiales sont créées comme en Espagne ou en Allemagne, où les machines ont été vendues par la marque Fahr.
En 1964 est acquise la société Paget – Omnium, spécialisée dans la fabrication de séchoirs agricoles. Rivierre étend ainsi sa gamme. Divers appareils seront proposés par la suite comme des vis à grain.
L'arrivée de la moyenne densité, du piston oscillant...
A partir du début des années 1960, les presses ramasseuses moyenne densité firent leur apparition. Rivierre aborde ce marché avec les presses à piston oscillant URD (3 roues) et URH (2 roues) reprenant grossièrement la cinématique des basses densités traditionnelles. Ces machines sont présentées dès 1962. La URH évoluera en DR2050 quelques années après. Ces machines compriment le fourrage sans le couper le préservant au maximum.
...Au piston à couteau
Toutefois la marque ne s’arrête pas là et étudie un modèle de presse moyenne densité avec piston à course rectiligne muni d’un couteau. La KR45 sort en prototype au début de l’année 1963 et sera rapidement commercialisée. Munie d’un ameneur à deux fourches synchronisées, de noueurs allemands Rasspe, elle connaît le succès. Suivie par la KR40 en 1965 avec un canal plus petit en section, déclinée par la suite en KR junior puis KRJS.
Une automotrice à la conception révolutionnaire
Face au succès des machines à maïs, la société décide du développement d’une machine automotrice pour la récolte du maïs. En effet la majorité des moissonneuses batteuses de cette époque étaient de conception basique héritées des batteuses d’antan. C’est ainsi que naît le projet ABM (automoteur batteur maïs) avec un cueilleur à trois ou quatre rangs et une batteuse à flux longitudinal à deux rotors. Le nettoyage est assuré par grilles et ventilateur. Cette batteuse est quasi-révolutionnaire pour l’époque, assurant un travail très propre. Il faudra attendre plus de 10 ans avec la sortie de l’Axiale Flow pour revoir un tel système en moissonneuses batteuses.
En 1967, suivant la sortie de l’ABM la couleur des machines passe du gris métal/rouge au jaune abricot/blanc. Cette même année est testée la ER40 une presse moyenne densité destinée aux exploitations familiales. Elle sortira en série l’année suivante.
Une crise déstabilisante
L’année 1968 est troublée par les événements de Mai, s’en suivent retards d’approvisionnement et de livraisons.
Rivierre-Casalis comme beaucoup de ses homologues, fait les frais de la crise du machinisme agricole à partir de 1969. Celle-ci s’illustre par un renversement du marché, une chute des ventes de matériels. La plupart des exploitations agricoles étant désormais mécanisées, le besoin est moins important.
C’est toutefois à cette époque que sortent les premières ensileuses. Rivierre Casalis spécialiste de la récolte des fourrages et du maïs doit suivre également cette technique nouvelle qui s’étendra pendant les deux décennies à venir. Des modèles portés et trainés seront proposés.
Le temps des presse basse densité arrivant à sa fin, les appareils à maïs restant des machines assez spéciales avec des ventes relativement limitées, l’avenir semble un peu plus incertain pour la société… Une « division industrie » est mise en place, visant des activités de sous-traitance en usinage ou tôlerie.
C’est toutefois le 7 novembre 1972 que la 100 000ème presse sort des usines de Fleury. La valeur de la machine est donnée par la direction au comité d’entreprise.